Je vous écris mes vers telle une lettre
Es espérant vous voir raisonner
Avant que votre ouïe ne se lasse.

Mon peuple vient des Nahuas
Les miens oublient
Oublient de le rappeler à leurs enfants.

Voici ces mots que je brasse, in no tlahtol
Peut-être, peut-être que votre esprit
Revivra quelque chose.

Je vous chante in no tepeh, je vous chante ma montagne
Mon archange ; mon peuple
Ce qu’il en reste, les miens.

De mon tepetl j’aimerais vous montrer
Sa flore et sa faune
Son vent et sa pluie.

Ses majestueux quanme, ses arbres,
Que j’ai vus, et que mes enfants
Ne pourront plus jamais voir.

Son air condensé: cualtzin ihuiac
L’odeur de pin, que j’ai humé
Et que mes enfants ne pourront sentir.

Ce temps de pâturages tendres
De belles fleurs ! Nepapan xochitl
Le mets de singuliers colibris.

Ses ruisseaux aux eaux si douces: nonque ameyal.
Aujourd’hui, leurs ventres sont à sec !
Telles des fleurs mortes couvertes d’épines.

Où est passé in non mazatl, le cerf,
Dont le nom
Etait si fièrement porté par les miens ?

Où est passé in coyotl, le coyote,
Dont le chant si lugubre,
Faisait fuir les gens de peur ?

Où est passé in cuanmis?
Oh, téméraire chat sauvage!
Je n’ai pu connaître que ta peau.

Où sont passés ses oiseaux: nonque xohiboton¹
Au chant si beau
Dans leur campagne fleurie ?

Oh, mon grand teotl!
Donne à mon âme la force de continuer
Elle qui a mal.

Où est passé le lièvre, in cihtochtli
Ou tzin cotoc, tel que l’a appelé
Un autre village ?

Où est passé in tecolotl, le hibou,
Bien que les miens se meurent,
Il n’a même plus hululé.

Que puis-je te dire de mon archange ?
Qui est là, seul,
Rangé dans son temple.

Tout mon peuple
A été souillé par les ordures
Jetées par le « citoyen ».

Où sont passées nos jeunes femmes
Avec leur rebozos, leurs beaux visages
Cuirassés par le soleil ?

Où sont passés les beaux vêtements ?
Je crois que la « modernité »
Les a mangés.

Et où est passée l’union
Et la force de nos aïeux ?
Aujourd’hui, l’éducation semble les avoir divisées.

Post-scriptum.

Les peuples vivent une métamorphose
En construisant leur passage sur cette terre.
L’homme, pressé, ne regarde plus
Le creux dont il intensifie la profondeur.